Les conservateurs se sentent oubliés.
La commission de la culture, de l'éducation et de la communication du Sénat a procédé, le 13 avril dernier, à l'audition de Christophe Vital, président de l'Association générale des conservateurs des collections publiques de France (AGCCPF). Celui-ci a notamment apporté un éclairage intéressant sur la situation et les difficultés des conservateurs. Il a commencé par rappeler l'"évolution spectaculaire, à la fois qualitative et quantitative" des musées de France depuis les années 70. Leur nombre a en effet pratiquement doublé en 50 ans, pour atteindre aujourd'hui 1.418. Cette évolution résulte, bien sûr, des grands chantiers parisiens de l'Etat (nouveau Louvre, Beaubourg, Orsay, Quai Branly...), mais aussi d'"une dynamique portée par les collectivités territoriales". Pendant plusieurs décennies, cette évolution a été soutenue par une forte présence de l'Etat, qui a joué "un rôle d'incitation, d'accompagnement, à travers une administration centrale forte à l'époque et des financements très significatifs - ce qui a d'ailleurs pu avoir des effets pervers, la réflexion sur le coût de fonctionnement des musées n'ayant pas alors été encouragée".
Sans évoquer pour autant un désengagement de l'Etat, le président de l'AGCCPF ressent aujourd'hui "un accompagnement moins fort et un affaiblissement de la direction des musées de France, dû à l'émergence d'établissements publics autonomes et de la Réunion des musées nationaux (RMN), ainsi qu'à la révision générale des politiques publiques (RGPP)".
Mais, au-delà de ces considérations professionnelles, les conservateurs ont aussi du vague à l'âme. Ils ont en effet "le sentiment d'être oubliés dans les textes et rapports". En témoigne notamment le récent rapport de la Cour des comptes qui "insiste sur le travail positif réalisé en matière d'inventaires et de récolements, alors que les conservateurs ne sont jamais cités". Ce sentiment est d'autant plus vif qu'environ cinq cents conservateurs vont partir en retraite dans les cinq à dix prochaines années et que leur remplacement s'annonce difficile. Selon le président de l'AGCCPF, il faudrait en effet plus de trente promotions de l'Institut national du patrimoine (INP) pour assurer la relève...